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Retour sur la participation du SUAL au congrès Albatros

Mis en ligne le 28 décembre 2021

Le 8 décembre dernier avait lieu le 15ème congrès de l’Albatros/WADD à Paris. La thématique était la suivante : quand les addictions mettent au défi les autres disciplines. Le Dr. Mathieu Chappuy, pharmacien de l’équipe du SUAL, a tenu une présentation « Access to medications for adult ADHD in Europe ; updates in France » dont voici le contenu.

Un trouble à vie pour au moins la moitié des malades

Le trouble déficit d’attention avec ou sans hyperactivité (TDAH) a une prévalence estimée à environ 4% en France chez l’enfant et de 2,5% chez l’adulte. Il représente l’un des troubles mentaux les plus fréquents chez l’enfant, l’adolescent et à l’âge adulte. Il est caractérisé par l’association de symptômes d’inattention, d’hyperactivité et d’impulsivité dont l’expression peut varier au cours du temps et en fonction de l’environnement. Il persiste durant la vie entière des sujets dans environ 50 à 65 % des cas, avec des altérations significatives dans plusieurs domaines notamment :

  • les apprentissages,
  • le fonctionnement social,
  • les conduites à risque à l’adolescence,
  • le maintien dans l’emploi à l’âge adulte.

Pour traiter ce trouble, il existe des médicaments dont le méthylphénidate (Ritaline® et autre) qui sont des psychostimulants.

Le méthylphénidate et les évolutions législatives

Fin 2019, le SUAL a publié dans le Lancet Psychiatry, une lettre qui montrait les disparités d’accès au méthylphénidate en Union Européenne. En effet, en France, le traitement devait avoir été initié dans l’enfance pour pouvoir en bénéficier à l’âge adulte. Si le diagnostic avait été réalisé à 18 ans révolu, vous étiez alors hors indication et non pris en charge par l’assurance maladie. Le coût du traitement pouvait alors être un frein pour les patients. Tout ceci, alors que nos voisins (hors Italie) permettaient l’initiation à l’âge adulte.

Le 18 mai 2021, la France a autorisé l’initiation chez les adultes à une condition (unique en Europe), que l’on puisse documenter rétrospectivement la présence du trouble dans l’enfance. C’est donc une avancée. La prise en charge par l’assurance maladie est, à présent, une question de temps.

Autre frein, la prescription initiale était réservée aux neurologues, pédiatres et psychiatres hospitaliers. Depuis le 13 septembre 2021, la prescription est ouverte en ville (hors structure) à ces mêmes spécialistes. C’est donc, également, une avancée majeure qui simplifiera l’accès aux soins pour les patients. En revanche, on peut regretter que les addictologues non psychiatres ; qui rencontrent souvent ces patients ; ne puissent pas le prescrire.

Les médicaments dérivés des amphétamines…

Lors de la présentation du congrès de l’Albatros/WADD, tous les médicaments utilisables dans le TDAH de par le monde ont été présentés. Pour chaque produit, une comparaison d’accès avec les autres pays de l’union européenne a également été réalisée. Il en ressort que la France, comparée à ses voisins européens, ne dispose que du méthylphénidate. Le choix est plus que restreint.

La raison est assez simple et tient à l’histoire. En effet, ces médicaments sont des amphétamines ou des dérivés. Or, les amphétamines ont une tendance à abimer le cœur. Le scandale du Médiator® a poussé les autorités de santé publique à refuser son utilisation en France. Il existe cependant une petite différence. En effet, le Médiator® était prescrit hors indication pour perdre du poids : sa balance bénéfice risque était négative. Dans le TDAH, il permet au patient d’avoir une meilleure qualité de vie lorsque le traitement fonctionne. Ceci-dit, un bilan cardiaque poussé devrait être fait régulièrement pour s’assurer que le médicament n’altère pas le cœur. Si c’est le cas, la poursuite du traitement doit être immédiatement remise en question.

... et les autres 

Pour les médicaments qui ne sont pas des dérivés amphétaminiques, leur absence en France est liée au refus des laboratoires de baisser leur prix lors de la négociation avec le comité économique des produits de santé. Cet organisme interministériel détermine le prix remboursable en France au regard du bénéfice apporté pour le patient. A titre d’exemple, si les laboratoires vendent 100€ la boite à tous nos voisins et que la France n’accepte qu’un prix de 75€ maximum alors le laboratoire aura tendance à maintenir son prix et ne commercialisera pas son produit en France. En effet, peu d’industriels, pour des raisons de rentabilité, accepteraient d’uniformiser leur grille tarifaire à la baisse à la demande d’un pays…

Pour les patients qui ne répondent pas au méthylphénidate, les médicaments disponibles chez nos voisins le sont uniquement sur dérogation. C’est un protocole lourd et complexe que seuls les praticiens hospitaliers peuvent demander à l’Agence Nationale de Sécurité du Médicament. Lors de la présentation du 15ème congrès, la méthodologie pour demander ces autorisations a été rappelée.

Finalement, la France ouvre aux adultes, sous conditions, l’accès au méthylphénidate en simplifiant également leur prescription. Deux attendus qui permettront de mieux prendre en charge les patients. Cependant, les médecins aimeraient l’accès à d’autres médicaments (comme chez leurs voisins européens) pour faciliter le traiter des patients qui ne répondent pas ou tolèrent mal le méthylphénidate

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